[fr] Lou Cadilhac - Ce qu’il faut comprendre

Ce qu’il faut comprendre sur le viol, c’est que ce n’est pas un moment inscrit dans une temporalité restreinte, qui s’évanouit lorsque l’agresseur est parti ; 

Le viol, c’est cette impression-là, tenace et permanente, invisible et omniprésente, d’avoir perdu l’existant à soi, d’être évacuée dans les limbes d’un espace qui n’appartient plus à la communication,
C’est la certitude de ne plus savoir qui est le corps, 
C’est la peur panique de se retrouver de nouveau près d’une peau qui n’est pas sienne, 
C’est l’impossibilité de ressentir de nouveau : l’entièreté d’être soi.

C’est encore, cette dissociation qui vient me gratter les entrailles quand j’essaye d’être auprès de l’autre 
Ce sont les insomnies qui s’égrènent les unes après les autres, les palpitations qui viennent me dire que le sommeil est encore autre part 
C’est cette lassitude-là de la haine de son propre être, l’épuisement de vouloir oublier son corps.

Le viol défonce l’être dans les plus petites unités de ce qui le composent, le font éclater dans une myriade de mirages impréhensibles pour celle-là qui n’arrive plus à parler d’elle. 

Il est inutile de nous insuffler ces vaines injonctions à la résilience, inutile encore de nous encourager à l’exercice de la volonté quand les amarres qui nous retenaient à l’être qui décide ont été rompues. 
Il est inutile de nous dire que nous sommes plus fortes que cela, quand nous ne savons plus ce qu’est l’être. 

Le viol, c’est cette désertion de soi-même qui n’en arrête pas de marcher nue sur les chemins d’une rédemption évanescente. 



* Lou Cadilhac 
J’ai toujours trouvé dans la littérature l’espace de ma plus intime intériorité. Je suis passionnée par la compréhension de mon existence et du monde, fascinée par l’altérité qui est soi et par l’étranger qui nous appartient. 




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