Pétrifier, du latin petra (pierre, rocher). Le mouvement. Une feuille qui se glisse imperceptiblement dans l’eau, un animal qui vient éparpiller ses pas au gré de ses déambulations. Les hommes qui marchent, qui rient, qui grouillent, qui dansent et font scander leur pas sur les sentiers de l’espace partagé.
Le mouvement. La paralysie. Euthanasie, absence de vie et de souffle. L’Autre arrivent, elle est deux, son souffle s’évacue et elle l’entend comme venant d’une source rattachée à son corps mais étrangère, comme un filet de vie mécanique qui n’est plus relié à ses poumons.
Elle regarde le dôme formé par la couverture, et elle sait qu’elle ne sortira plus jamais de ce Temple.
Un bruit ? Non, rien, bien évidemment qu’il n’y a pas de bruit. Elle a un cœur d’enfant et son corps est déjà entraîné dans une maturité irrévocablement meurtrière.
Crie-t-elle ? Non, bien sûr qu’elle ne crie pas. Pourquoi aurait-elle crié ? Ce qui s’est passé n’a pas de nom. On ne dit pas ce qui n’a pas de nom. On ne pleure pas au nom de l’Inexistant.
Elle a sorti la tête de la couverture, mais est encore sous cette épaisse couche d’existence qui a commencé à prendre corps sur sa peau.
Par la fenêtre une branche d’arbre vient éveiller son regard. Les feuilles remuent lentement, et le mouvement de l’arbre vient scander le son saccadé du souffle qui s’échappe mais qui n’est pas à elle. L’arbre bouge, lui qui est tronc et dur, il vit et vient éclabousser d’un projecteur vert son immobilité.
Une feuille vient en bousculer une autre et ce choc minuscule vient rappeler celui de ces deux choses collées quelques siècles plus tôt. Il est 14 h et elle a 8 ans ; quand elle aura connu le double de cette existence, elle aura l’air d’un être différent mais l’Autre sera toujours celle du Temple, unitemporelle et morte-vive.
Il est 14h peut être, il sera ensuite 20h, 8h, 16 heures parfois, et toujours elle se verra à côté de son corps.
Elle regarde de nouveau par la fenêtre, mais le vert qui envahissait l’encadrement a disparu.
Il est 14h, Lili a 8 ans et son monde est unicrome.
* Anaïs Rey-cadilhac, 28 ans ; je suis passionnée par la littérature, les sciences sociales et l’interculturalité de manière générale. Après des études à Lyon, je vis actuellement à Montpellier ma ville d’origine où je donne des cours de FLE (Français Langue Etrangère) ; dernièrement débarquée dans la belle Ville de Barranquilla en Colombie pour un stage d'enseignement.
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